2019 - l’homme de Vitruve

je ne dors pas : l’homme de Vitruve, 05.V.2019, installation, branche d’érable coupée, palette en bois (120 x 99 cm), cercle en métal (ø 33 cm), oiseau mort, l’ensemble environ 450 x 350 cm au sol, vue d’atelier

je ne dors pas : l’homme de Vitruve, 05.V.2019, installation, branche d’érable coupée, palette en bois (120 x 99 cm), cercle en métal (ø 33 cm), oiseau mort, l’ensemble environ 450 x 350 cm au sol, vue d’atelier

Léonard de Vinci, Les proportions du corps humain selon Vitruve, vers 1487-1490, dessin à la plume et au lavis recouvrant des trous et des incisions à la pointe de métal sur papier, 34,4 x 24,5 cm, Venise, Gallerie dell’Accademia (inv. 228)

je ne dors pas : l’homme de Vitruve, 05.V.2019, installation, branche d’érable coupée, palette en bois (120 x 99 cm), cercle en métal (ø 33 cm), oiseau mort, l’ensemble environ 450 x 350 cm au sol, vue d’atelier
je ne dors pas : l’homme de Vitruve, 05.V.2019, installation,
branche d’érable coupée, palette en bois (120 x 99 cm), cercle en métal (ø 33 cm), oiseau mort,
l’ensemble environ 450 x 350 cm au sol, quinze vues d’atelier
« je ne dors pas ».
« je » : lequel ?
celui, invasif, des hommes de l’Anthropocène, ivres de puissance et d’accélération ?
celui, inquiet, des Terriennes et des Terriens, vivant dans tout leur corps, sans résignation, l’accélération des déforestations et de l’artificialisation des sols – la sixième extinction de masse des espèces vivantes ?
celui, soustractif, du peintre, du poète et du philosophe, essayant, par leurs actes d’attention, de mieux écouter les résonances singulières et universelles des vies amples ?
celui, le tien, à la recherche d’une géologie conceptuelle et sensible plus égalitaire et plus aimante de la nature autre qu’humaine ?
« je ne dors pas », murmure l’oiseau, « je suis mort – le 5 mai, un dimanche matin, devant la fenêtre de ton bureau, tu m’as fermé les yeux : as-tu déjà oublié ? ».
décercler.
décadrer.
ne pas oublier, cependant, les observations et les études de Léonard sur le vol des oiseaux.
ni le souffle du poème :
Tous les souffles se sont abattus
sur ta poitrine effarouchée… vers où ?
Et puis : comme si plus rien ne battait en toi, –
te voilà un petit mensonge
sans chant ni sens.
Toi, petit oiseau étranger, je te dépose
dans la petite forêt sans chemin,
afin que, avant que tu ne perdes le souvenir
de ton sang, qui bourdonnait sombrement
et sans raison se tut en toi, –
tu entendes déjà frapper à tes plumes
le grand cœur des choses du dehors,
comme s’il battait en toi.
Rainer Maria Rilke, « Avec un petit oiseau mort » (27 octobre 1899), Poèmes épars et fragments (1897-1926), dans Œuvres poétiques et théâtrales, Gerald Stieg (éd.), Paris, Gallimard, Bibliothèque de la Pléiade, 1997, p. 757-758.